BONNET DE LAINE MAROCAIN
Au pied des remparts d'Essaouira, un Marocain m'aborde en anglais.
Bavardage normal, puis la question habituelle :
— Where are you from ?
— From France.
— Pourquoi tu me réponds en anglais si tu es français ?
— Parce que tu me poses des questions en anglais !
— Je te croyais anglais.
— Je ressemble à un Anglais ?
— Tu as aussi un accent un peu comme les Allemands.
— Quand je parle français ?
— Non, quand tu parles anglais.
— Oui, on m'a déjà dit ça.
— Des Marocains ?
— Non, des Suédois.
— Tu es allé en Suède ?
— Non, c'était quelque part en Asie.
— En tout cas tu parles bien le français.
— Bah merci, c'est déjà ça !
— Tu veux du haschisch ?
— Non.
— Alors tu veux quoi ?
— Bah rien, tu as remarqué, je ne t'ai rien demandé ? Toi, tu veux quoi ?
Un sac en plastique apparaît alors de je ne sais où. Il en sort des bonnets de laine comme des lapins d’un chapeau. Quel talent !
Il me dit :
— Tu as l'air d'avoir froid. D'habitude, c'est 50 dirhams le bonnet de laine, mais pour toi c'est 40 !
J’éclate de rire.
— Tu plaisantes ou quoi ? Je les ai vus à 20 sur la place !
Je regrette aussitôt ce que je viens de dire.
Il fait :
— D'accord chef, 20 dirhams !
Puis il m’enfonce sur le crâne un de ses bonnets en grosse laine qui pique, tend la main pour réclamer son argent, puis conclut dans un sourire :
— Have a nice day, my friend !
Et il file.
Voilà, après tous ces voyages, j’arrive encore à me faire avoir comme un bleu. Je viens d’acheter un truc dont je n’ai pas besoin à un Marocain qui m’a pris pour un Anglais à l’accent allemand !
Je devrais peut-être essayer de troquer mon bonnet de laine contre un chapeau melon ou un feutre à plumes.